Les vacances, c'est partir en voiture. La veille, faire les bagages est une vraie plaie. Réfléchir au nombre de t-shirts, de culottes, de jeans et de baskets qu'on prend. Et un pyjama. Et le démaquillant que je n'utiliserai pas parce que de toutes façons je ne me maquillerai pas parce que là bas, je me sens déguisée avec du mascara. Mais prendre quand même du vernis à ongle parce que c'est sûr j'aurai enfin le temps de me poser et de mettre du vernis. Alors que je ne le ferai pas. Mais garder quand même des liens avec ma vie de Paris, avec ma vie de parisienne. Parce que sinon, ce sera trop bizarre, trop brutal.
Partir tôt le matin avec des petits beurres, du chocolat noir, des BN et du café dans la thermos. l'iPod chargé avec de la musique et des podcasts des émissions qu'on n'écoute jamais sinon. Et faire pipi avant de partir. Et fermer les volets et mettre l'alarme. Ou pas. Et retourner dans la maison pour vérifier que le gaz est coupé, que la lumière est éteinte, que la porte de derrière est fermée.
Attacher tout le monde.
Et refermer la portière.
Sur notre bulle. Tous les 5 et la voiture.
On part et on voudrait déjà être arrivés. Au soleil ou bien chez Grand-Père et Grand-Mère ou bien les deux (?) ou bien à l'aventure. On n'est pas très aventure. Enfin si, l'aventure c'est de partir tous les 5 en voitures. Même si c'est dans le Vexin.
(...)
[Le péage, le deuxième péage, le bouchon des travaux, les voitures qui doublent à droite sur l'A13 et le Q7 qui fait des appels de phare sur la voie de gauche. Les kékés en audi A3 et la famille à rallonge dans le minivan bleu marine, Caen et sa sortie périphérique nord et pas centre, Villedieu les Poêles et Avranches qui n'arrive jamais. Les Enfoirés à fond et tout le monde qui chante trop fort. Stop à Pontorson au Mac Do. 5 minutes après le routier qui a érigé un totem en forme de plateau repas de Flunch pour signaler sa présence au bord de la nationale. Michel Jonasz et Lady Gaga. La RN 12 enfin. Tout le monde s'endort. Pas moi. Je suis au volant]
Au kilomètre 450, je me dis que je n'en peux plus de ce ruban d'asphalte long et ennuyeux comme un Zan sans bonbon au milieu.
Que même après 10 BN et une Ceasar Salad-Coca Light, j'ai toujours un creux dans le ventre, et je ne sais plus si j'ai envie de manger ou de passer à la diète pour 10 jours. Frédéric Taddéi s'ennuie avec Claudia Cardinale et moi aussi. L'interview s'étire et Claudia enfile les perles comme les cochons la confiture. Je zappe sur Inter. Un biologiste parle de l'évolution des espèces et compare les kangourous aux dauphins. Flash Infos. Bruno Masure cabotine et le journaliste aussi. On est entre professionnels, non ? Mon esprit vagabonde et s'ennuie. Le soleil s'est levé et mes avant-bras sont tout chauds. Je coupe la radio. Je roule à 110. Je ne double personne parce qu'il n'y a personne. Mon esprit a tout le temps de vagabonder, de refaire l'histoire et de l'enjoliver, de la déformer, de la détemporiser.
Je me dis que je suis à ma place, là, et que je ne voudrais être nulle part ailleurs.
(...)
Sortir à Prad Pit, prendre à gauche au rond point et devant le collège du Vizac. Tout le monde est réveillé. Le jardin est fleuri, regarde le camélia il est magnifique, youpi on arrive, vous rangez la voiture, ne vous détachez pas de suite, regarde grand-mère nous attend, tu crois qu'il y aura du Nutella ? J'ai perdu ma chaussure, Coucou Grand-Père, attention il y a du vent, ils sont là les cousins ? Mets-toi en prise, le frein à main n'est pas sûr.
J'ai les jambes toutes engourdies. J'embrasse maman et je réponds on a bien roulé, pas trop de monde oui, attends, je vide la voiture tu nous fais un thé ? Je souris comme une Ravie de la crèche et je respire à fond l'air qui sent bon, un mélange d'iode, de fleur et d'odeur de maison.
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