dimanche 8 juillet 2012

Martin dans le train



C'est un jeune homme de 18 ans. Sweat à capuche, cheveux bruns emmêlés, eastpack graffé par des potes, van's défoncées et l'air de sortir de son lit.
A sa droite, son grand père, septuagénaire portant beau, chevalière en or et peau burinée, cheveux blancs plaqués et l'air digne de celui qui l'en pense pas moins mais qui sait se vêtir pour aller en ville. Devant lui, son épouse - c'est comme ça qu'il la présente quand il rencontre des connaissances dans la rue. Cheveux mis en plis, tailleur jupe couleur sable avec veste à manche au coude collants chair et souliers à lacets blancs compensés. Discrètes bagues en or, sillage de Canoe de Dana, l'air alerte et dynamique même si ses rhumatismes / son foie / son cholestérol lui font chauffer la carte vitale un peu plus qu'elle aimerait.
Ils prennent le train ensemble avant de se séparer à Saint Lazare. Ils se retrouveront plus tard. Mamie fait la conversation et essaie de réveiller ses deux hommes, l'un perdu dans ses pensées, et l'autre tout encore embué du sommeil qui assomme à l'adolescence, quand on est resté regarder des films jusqu'au milieu de la nuit, lumière stroboscopique, son saccadé dans le casque dans le silence de la maison profondément endormie.
Hugo ne sait pas trop quelle attitude adopter. Sa grand mère est si gentille, montre tant de sollicitude à son égard, essaie de recréer la complicité qu'il avait avec son grand père quand il était petit et qu'il passait tous les mercredis dans le jardin de leur pavillon.
Mais il a grandi, aujourd'hui il a ses potes, sa copine et le bahut loin de Paris et par moment il a l'impression d'être Gulliver au pays de Lilliput.
Et s'il sait qu'il adore ses grands parents, il se dit que leurs manières et leurs habitudes l'encombrent un peu. Son grand père et ses vues rétrogrades de la France, ses valeurs et sa rengaine nostalgique. Sa grand-mère et son obsession de plis sur les vêtements bien repassés, des plats mijotés et des desserts maison.
Il regarde dehors, hoche la tête machinalement, esquisse un sourire pour lui faire croire qu'il l'écoute. Elle fait semblant de ne rien remarquer et continue son monologue, heureuse d'être là avec ses deux hommes pendant  quelques minutes.







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