jeudi 31 janvier 2013

Dans la salle d'attente

Mdolla


Sur la porte du cabinet il y a écrit sonnez et entrez en tournant la poignée et sur la salle d'attente un avis qui met en garde les patients qui ne viennent pas aux rendez-vous sans prévenir.
La pièce est lumineuse avec du carrelage par terre et des murs recouverts de paille de riz avec une couleur neutre, un vieux rose ou un jaune pâle, c'est tellement neutre qu'on ne s'en souvient pas.
Il y a des chaises le long des murs. On se salue sans vraiment se regarder. ici on est tous malades et ça devient un jeu d'essayer de deviner pourquoi chacun a pris rendez-vous ce matin. `
Facile pour ce beau bébé qui renifle et qui tousse, facile pour cette dame âgée qui se plaint à la dame qui l'accompagne que ses yeux coulent, pas facile pour cette maman fatiguée qui attend avec ses deux enfants jeunes adolescents.
Tout le monde attend en se demandant quand viendra son tour et qui a rendez-vous avec Dr B ou avec Dr T.
Avant on feuilletait sans passion des magazines gratuits de la CAF de mai 2010. Maintenant on a son smartphone à la main et on en profite pour virer tous ses messages inutiles, faire une partie d'Angry Birds ou faire semblant de s'occuper alors que son esprit s'évade, s'inquiète, s'impatiente, se résigne.
Les voix sont chuchotées, les bruits son sourds.
La porte s'ouvre : le médecin passe la tête et appelle un nom avant de céder le passage et de préciser "Bonjour, oui au fond à gauche" tout en refermant la porte.
La porte s'ouvre de nouveau, un nouveau patient entre apportant avec lui un peu d'air frais du dehors. Il pleut, son parapluie dégouline, ses lunettes sont couvertes de buées.
"Bonjour" marmonne-t-il.
"Bonjour" lui répond-on. Ca me rappelle quand j'étais petite et qu'on allait chez le Docteur au moment des consultations libres. La salle d'attente était pleine et même si tout le monde se connaissait - petite ville oblige - personne ne se lançait vraiment dans de grands dialogues. La salle d'attente du médecin, ce n'est pas la place du marché, pas la file d'attente de la Poste. On est dans l'antichambre du Savoir, ce préambule au soulagement ou à l'angoisse qui monte. Personne ne bavardait donc, mais chacun, en entrant, saluait les autres en disant "Messieurs, dame" en mettant un accent tonique montant sur le "me" de messieurs et descendant sur  le "da" de dame. Et tout le monde  de répondre  quelque chose - je ne sais plus quoi - sans forcément lever le nez de son "Jour de France". Et moi je balançais mes jambes sur ma chaise en trouvant le temps longs.
Je finis par me lever pour aller regarder les petites brochures qui sont sur un présentoir fixé au mur. Les mêmes dessins un peu naïfs, les mêmes photos de banque d'image irréelles comme un sitcom AB production et ses thématiques immuables : allaiter, pourquoi ? Les 10 règles pour un sommeil réparateur ? La ménopause, ce n'est pas une fatalité? La bronchiolite, prévenir pour ne pas avoir à la guérir.
Je me rassois en regardant l'heure et je réfléchis à tout ce que je ne dois pas oublier de demander ou de préciser.
La porte s'ouvre de nouveau. C'est mon tour
J'attrape mon manteau, mon parapluie, mon sac, mon écharpe et je sors pour aller au fond tout droit, suivie du médecin qui sourit.






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