lundi 16 février 2015

La petite fille et le temps qui passe


Sempé



Ce week-end j’ai croisé Madame Berthou, cette institutrice dont je me souviens comme de celle qui m’a donné le plaisir d’écrire pour raconter le quotidien.

A chaque retour de vacances, parfois même de week end, elle nous demandait d'écrire une rédaction sur ce que nous avions fait pendant cette absence de la vie de la classe. Je n’ai gardé aucune copie de cette année là, je n’ai fichtrement aucune idée de ce que je pouvais écrire alors, mais je me souviens que cet exercice me faisait toujours un petit bond dans la poitrine et que j’attaquais ma feuille à carreaux comme d’autres mordent dans un éclair au chocolat,  avec gourmandise. 


Elle, de son côté, prenait un malin plaisir à nous enseigner l’Afrique vue par les yeux de son frère missionnaire, les bancs de l’université par sa fille, forcément brillante et la grammaire et l’orthographe, chevaux de bataille de son mari, professeur de latin et esthète d’une belle langue sans faute « comme on l’enseignait avant ». Elle était bavarde, et elle aimait faire des digressions et transformer la classe en salle de contes… J'étais aux anges, forcément.

Ce week end, lorsque je suis allée saluer cette désormais vieille dame  aux cheveux blancs et que je me suis présentée sous mon nom de jeune fille, elle m’a répondu du tac au tac « mais je sais très bien qui tu es, tu n’as pas changée. Je me souviens, tu avais toujours beaucoup de choses à dire ». Je l’ai remerciée pour m’avoir donné le goût du Français et de la rédaction mais je n’ai pas osé ajouter qu’elle était, de fait, à côté de Nicole Croisille, la marraine de ce blog. Nous avons parlé de mes camarades de classe depuis longtemps perdus de vue, Claude, Philippe, Laurence, Marie-Paule, Martine. J’étais debout face à elle, mais je me sentais toute petite de nouveau. Elle, fière de me présenter aux dames autour d’elles, et moi, en jeans et sweat shirt, les cheveux longs nattés et le visage sans maquillage, le sourire aux lèvres comme je l’étais sans doute en 1981, dans sa classe de CM1 qu’on appelait encore 8ème.





1 commentaire:

LinkWithin

Blog Widget by LinkWithin