Il est des lundis soirs comme des retours à l'âge de pierre.
Sur le quai, nuée d'humains fatigués, bougons, pressés et le front plissé.
Bousculade et embirlificotage pour atteindre la voie 7 (pourquoi la 7 ce soir alors que normalement c'est toujours la 9 ou la 11 ?).
Voix monocorde et insensible au chaos qui égrène les annonces de départs retardés / annulés / du haut de sa tour de contrôle invisible (mais où se cache-t-il ?)
Trop de monde pour s'asseoir dans le train et personne qui bouge pour s'avancer dans l'allée et soulager la pression près des portes
Jeune mère égarée avec énorme poussette - hagarde à l'entrée du wagon et tout pleins d'yeux qui ont subitement très envie de regarder leurs chaussures - dès fois qu'il faudrait l'aider.
Mal embouché qui peste à haute voix contre ces "mères de famille irresponsables qui ont le temps et pourraient prendre les transports aux heures creuses plutôt que de nous poursuivre avec leur marmaille hurlante au nez qui coule".
Re-yeux sur les chaussures. Un peu honteux quand même.
Nuit subite dans le train et attente. Attente.
Attente encore.
Voix monocorde qui annonce l'annulation du train de 19 heures 57 en voie 7 mais annonce le départ imminent d'un train pour la même direction 8 voies plus loin.
Marée humaine qui se lève comme une Holà pas gaie pour courir voie 15 histoire d'avoir peut-être une place assise cette fois ci.
Ouf. Assis dans le train.
Tout le monde se perd dans son livre, son magazine, ses pensées, le volume maximum de son iPod branché sur Eminem-meets -les-Tambours-du-Bronx.
Voisin d'en face pas grand mais avec grandes jambes qui prennent toute la place - jambes largement écartées. Est-il vraiment concevable que je place mes genoux dans l'espace béant ou bien alors je me plie en 12 pour faire disparaître cette situation qui ne gêne que moi ?
Départ.
Ouf.
Une onde de soulagement légère mais tellement bienvenue parcourt la masse des voyageurs amassés comme des sardines en boite non calibrées d'importation -huile comprise .
Gare d'arrivée.
Bousculade pour sortir.
Revoilà la jeune maman. Avec sa poussette devant les escaliers. Bien embêtée. Qui prend toute la place et augmente la bousculade.
Re-mal embouché qui peste à haute voix contre ces "mères de famille irresponsables qui ont le temps et pourraient prendre les transports aux heures creuses plutôt que de nous poursuivre avec leur marmaille hurlante au nez qui coule".
Jeune femme qui propose son aide pour porter la poussette. Grosses baraques qui passent devant - même pas honte.
La sortie. L'air frais du soir. Le téléphone qui sonne "T'es où maman ?".
Sourire.
Crédit Photo : Henri R.
Quand je prends le Rouen-Paris de 7 h 50, il y a toujours le matin sur le quai un aveugle avec sa canne blanche. Apparemment, il va bosser à Paris. Ici, on rencontre toujours les mêmes au même endroit du quai et les gens le connaissent. A travers la haie d'honneur qui se forme des 2 côtés des portières, pour laisser descendre ceux qui viennent du Havre, les gens l'aident à s'approcher pour qu'il monte le premier. Et ça me fait du bien.
RépondreSupprimerAnnnnne D