Avoir une grande famille c'est à peu près comme vivre dans une start up. Pour certains, ça commence au premier, pour d'autres ça arrive beaucoup plus tard. Chez nous, on a vraiment gagné l'esprit start up au 4ème.
Dans une start-up, ya un open space. Dans une famille élargie c'est pareil. Des lego dans le salon, un séchoir dans la chambre, une table à langer dans le couloir. On vit dans la cuisine, la cuisine s'ouvre sur le salon. On est tous ensemble, on a tellement peur de pas réussir à profiter les uns des autres qu'on veut se voir tout le temps.
Dans une start up, on est jeunes, on est trop cool, trop dans le mouv' des trucs à faire et à connaître. Dans une famille, on reste jeune longtemps. Pas le choix. Même à 45 ans les Memory restent une valeur sûre pour occuper les mouflettes. Quant à la musique et aux vêtements, c'est sûr qu'on aurait sans doute préféré échapper à Lady Gaga et aux Ugg. On se rattrape en mettant Supertramp à fond dans la voiture.
Dans une start up on manque vite de place. On rêve de s'étendre, de déménager, de se meubler design, de créer des "espaces" et des "atmosphères". En vrai, comme avec plein d'enfants, on se bat pour les mètres carrés, on va chez IKEA et chaque nouvelle réorganisation donne lieu à des négociations tellement serrées qu'à côté, la Communauté européenne à Bruxelles, c'est Nounoursland.
Dans une start-up, on a des subventions. Dans une famille aussi, ça s'appelle des allocs'. Et comme pour les subventions, les allocs' ça fait des jaloux même si ça fait pas vraiment bouillir la marmite.
Dans une start up, on se lève tous les matins en se promettant de travailler les fondamentaux, pour asseoir les bases d'un fonctionnement pérenne à base de process simples, redoutablement efficaces. Finalement, on se retrouve à gérer un bug imprévu, à faire un point avec Bernard de la compta et Cyril du fonds d'investissement avant même d'avoir ouvert une feuille Excel.
Dans une famille, ça donne le calendrier des servitudes familiales, le tableau des rendez-vous chez le dentiste, le pédiatre, le dermato et les réunions de café punaisé sur le frigo, ainsi que la résolution quotidienne de vraiment suivre son ado sur ses devoirs et la petite sur l'apprentissage de la propreté. Avant que pfffffiout une bronchite carabinée et le lave linge qui tombe en panne détruisent toute idée d'organisation sans faille.
Dans une start up, on manque parfois de recul devant les progrès de ses bébés. Que celui qui n'a jamais essuyé une larme de fierté au spectacle de l'école - pourtant passablement raté - de son enfant me jette la première pierre. On sait qu'on va y arriver parce qu'on y croit. Même si, objectivement, y'a encore beaucoup de boulot. Et plus le nombre d'enfants augmente, plus le manque de recul aussi. C'est le paradoxe de la multipare.
Dans une start up, un jour où l'autre, ça pète. Mêmes sans portes à claquer, on réussit les coups d'éclat, les coups de gueules et les mises au point qui montent dans les tours. Parce qu'on a quand même des objectifs à tenir, que ce soit la sortie de la bêta ou le passage dans la classe supérieure. Et qu'une bonne mise au point, ça fait parfois gagner beaucoup de temps.
Mais le mieux, c'est que dans une famille à étages, comme dans une start-up, on (se) dépense sans compter pour l'instant parce qu'on a une foi inaltérable dans l'avenir.
Ah ! J'adore ! Tellement vrai !
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