lundi 24 février 2014
Un dragon dans mon moteur
Je pourrais vous raconter l'aventure d'une panne de phares sur une 4 voies au beau milieu de nulle part alors qu'une nuit d'encre vient de tomber sur la campagne normande. Vous dire comme ça fait tout drôle de ne plus rien voir sauf dans le rétroviseur des feux jaunes qui se rapprochent drôlement vite alors que le GPS repète en boucle "faites demi-tour", "faites demi-tour" . Tout ça quand 10 minutes avant on était attablés au Mac Do, peinards et repus et qu'on était contents de ne plus avoir que 3 heures de route à faire.
Je pourrais aussi vous avouer quelques minutes d'inconfort réel le temps de trouver le moyen de faire taire cette pimbêche de GPS, de trouver une aire d'arrêt et de réaliser que non, vraiment, les feux ne veulent pas rester allumés plus de 10 secondes avant de rejoindre - en roulant à 50 et warning allumés dans un habitacle tout à coup très silencieux, vers l'abri moral du parking d'un magasin de meubles dont les vitrines encore allumées nous montrent des cuisines d'une tristesse qui les condamnent à ne jamais jamais rejoindre les pages de Pinterest.
(la suite de cette aventure palpitante après le saut)
La voix chaude et lointaine de la dame de l'assurance qui me demande ma localisation précise (euhh. le parking des meubles du Mont), le nombre de passagers et me propose de regarder comment me louer un véhicule de remplacement dans les meilleurs délais ou affréter un taxi qui me mènera à bon port pendant que ma voiture restera dans un garage, ici, au milieu de nulle part. "Mais ne vous inquiétez pas, un dépanneur devrait arriver dans les 30 minutes"
Restituer cette ambiance bizarre au bord des vitrines, les cinq enfants qui regardent une vidéo marrante sur mon Mac pendant que j'envoie des SMS pas super fiers à Jean qui me précise "qu'il y a un couteau dans la porte conducteur".
L'arrivée du dépanneur, jovial, qui constate la panne, décrète doctement " çac'estlecomodo", le remorquage de trois kilomètres jusqu'à un motel crânement repeint en ocre et vert à l'entrée d'une petite ville coquette et silencieuse. Les trois chambres au décor suranné et la porte en accordéon de la salle de douche.
Les enfants ravis et l'assureur qui m'appelle triomphant pour me dire que mon taxi pour Brest arrive et qui m'écoute un peu vexé refuser son plan super excitant - vider le monospace, reprendre la route à 22 heures avec des enfants épuisés et un chauffeur de taxi bavard et rejoindre un lit tard dans la nuit, et lui proposer une solution beaucoup plus attirante : se coller dans le lit, regarder Canalsat et repartir demain quand il fera jour et que les phares ne seront plus indispensables "puisquecestlecomodo".
La nuit.
Le petit déjeuner arrosé d'un verre de Tropico saveur orange et d'un Lipton Yellow parfaitement âcre sous le regard bienveillant d'un hôtelier ravi de l'aubaine de cette panne qui rompt la monotonie de la basse saison. Et puis, la fin de la route sous le soleil, la pluie, le soleil, et les premières courses dans le Super U pour attraper de quoi déjeuner dans la maison tiède et vide.
Je pourrais vous raconter ensuite les visites aux garages automobiles pendant la semaine pour réparer ces phares qui depuis l'arrivée à bon port fonctionnent à merveille et font se lever les sourcils des mécanos pourtant habitués à force, au langage approximatif de ces conductrices qui n'y comprennent rien en mécanique mais savent bien jouer de la corde sensible pour arracher un rendez-vous de diagnostic alors que "le planning est déjà plein" et que "si c'est lecomodo j'ai pas la pièce, ça vous changera pas la vie, faudra quand même que vous repartiez avec".
Regarder sur Google, se dire que comodo, ça me fait plus penser à ça que à ça, spontanément et que ça fait sourire cette idée d'avoir un lézard géant sous la carrosserie, qui joue avec mes nerfs et avec la lumière.
Même si finalement je suis repartie avec mes phares cabots brillant de mille feux et les sourcils toujours haussés du chef d'atelier qui "me croit, hein, mais qui n'a malheureusement pas réussi à reproduire la panne et de toutes façons j'ai pas la pièce alors".
Avant de conjurer le sort en préparant un far. Sans comodo mais avec des pruneaux.
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